Fils bien-aimé, proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, encourage mais avec patience et souci d’instruire. (2 Tm 4, 2)

Philippe (@phorterb)

mardi 11 avril 2017

Se soucier de soi


Se soucier de soi n'est pas seulement permis, c'est indispensable : encore une note discordante, une nouvelle fausse note, dans le concert des appels à mourir à soi, à se repentir dans la pénitence, la honte, la contrition, etc., dont l’Église ne cesse de nous accabler avant même que nous ayons pu ouvrir la bouche, surtout en période de carême*. C’est pourtant un prêtre, le Père Jean-François Noel, qui dans son dernier livre ㅡ Où es-tu ? Présence à soi, présence de Dieu ㅡ, secoue les cendres dont nous sommes couverts et restaure notre liberté vis-à-vis de Dieu. Sans doute parce qu’il est aussi psychanalyste, il écoute la prière de Job : Cesse donc de me fixer, pour me permettre un peu de joie, avant que je m’en aille sans retour au pays des ténèbres et de l’ombre épaisse où règnent l’obscurité et le désordre, où la clarté même ressemble à la nuit sombre. Lorsque Jésus rencontre Zachée, le paralytique ou la samaritaine, il ne commence pas par leur reprocher leur péché, il les rejoint d’abord dans leur souffrance humaine, dans leur angoisse de finitude. Ce point est essentiel car (page 72) quand la culpabilité est signifiée trop tôt, elle finit par agir contre elle et bloque le processus de « rentrée en soi ». Ce n’est pas d’abord en se reconnaissant pécheur que le fils prodigue avance en lui-même. Il y a un premier temps préalable. Et je me lamente de constater que le recours trop fréquent à la culpabilité ㅡ par exemple par le sacrement de confession ㅡ devient une occasion sournoise de démission de soi. Croyant repartir « à neuf », je me dispense du travail de conscience qui est pourtant requis dans le cadre du sacrement de confession. Pour que le second temps de la culpabilité puisse advenir, il faut d’abord qu’il y ait eu une promesse de vis-à-vis, suffisamment bienveillante mais non complaisante. C’est cette promesse qui met en route Zachée. Comme tous les ouvrages dont le contenu est très riche, celui-ci ne peut être résumé sans perte de sens : lisez-le absolument ! Il éclaire l’articulation du psychique et du spirituel. Vous y découvrirez sous divers éclairages, notamment celui de Saint Augustin, comment le travail sur soi est un préalable nécessaire pour retrouver la présence de Dieu en nous. Ce préalable n’effacera pas ce qui nous désole mais nous rendra capables de l’assumer, de le porter.  Prends ton grabat et marche ! Jésus ne débarrasse pas le paralytique de son grabat, mais il lui permet de vivre avec, il fait que ce grabat ne l’empêche plus de marcher. Ceci me remet en mémoire ce mot de Martin Steffens : une fois que je pardonne à mon passé d’être ce qu’il a été, alors des perspectives inédites se dégagent. Ce passé, mon triste passé, se révèle plein de richesses où je peux désormais puiser. (Rien de ce qui est inhumain ne m’est étranger - Éloge du combat spirituel : page 104)


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(*) Tiens ! Je ronchonne toujours !




2 commentaires:

  1. Bonjour,
    je vous conseil sur ce sujet la lecture de Pascal Ide "Eh bien dites: don petite éloge du Don" qui donne une position équilibré sur ce besoin de prendre soin de soi qui est présent dans l'évangile (cf. Mc 6, 31) et la radicalité du don de soi.

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    1. Merci beaucoup pour ce conseil. Je ne manquerai pas de lire cet ouvrage.

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